Cet été, comme des milliers de Français, j’ai passé mes vacances au Portugal. Et je me suis enthousiasmé pour les Porto : les Ruby, les Tawny, les Vintage… C’est simple, je ne jurais plus que par le Porto. Heureusement la Cave de l’Etoile, à Banyuls, m’a invité vendredi dernier (06/10) à une dégustation des Banyuls et Banyuls Grand Cru de sept millésimes, de 2008 à 1948, un par décennie. Histoire de me rappeler qu’à Banyuls, des terroirs uniques et des vignerons talentueux offrent des vins extraordinaires.
Les professionnels invités à cette dégustation auront l’occasion, dans leurs tribunes respectives, de décrire savamment ces 7 flacons. Ils parleront mieux que moi des grains de tanins encore crayeux du millésime 2008, des notes de sous-bois qui pointent leur nez avec le 1998, du changement d’univers avec le 1988, encore sur les fruits confits, encore sur la fraicheur mais avec des notes cacaotées qui arrivent, de la montée en intensité et du caractère « ranciogène » du 1978, des reflets verts, très rares, du 1968 ; pour le 1958, j’ai définitivement craqué sur l’harmonie du breuvage avec un exquis carré de chocolat (Olivier Bajard, Perpignan)… ; quant au 1948, l’émotion est aussi venue du témoignage de Marcel Centène, petit-fils de l’un des fondateurs de la cave, et pour qui 1948 est l’année de sa première récolte.
Ces vins proposent, au nez et en bouche, une complexité incroyable. On a du mal à réaliser ce que leur élaboration représente. Prenez le millésime 1968 : deux décennies à sommeiller dans de grands foudres de chêne puis presque trois décennies à poursuivre cette lente évolution dans des demi-muids ! Il n’a été conditionné qu’en 2015 ! Le prix de cette dive bouteille ? 315 €. Cher ? Mais combien coûte une excellente bouteille de Bordeaux de cette année-là ? Avec cette complexité-là ? « Avec un vieux Banyuls, on n’achète pas un soliste, mais un orchestre entier » s’enthousiasme le sommelier Philipe Nusswitz. Et ça fait 6,50 € l’année de vieillissement…
Dans la revue du Vin de France d’octobre 2017, le journaliste Pierre Citerne, grand connaisseur des vins de notre région, a décerné la note de 20/20 au Banyuls millésime 1966 (340 €). L’autre note équivalente, il l’a attribuée à un Rivesaltes de …1875 !
Le caractère chaleureux de cette visite-dégustation ne tenait pas à la seule qualité des vins offerts à nos papilles. Également à la gentillesse des femmes et des hommes de la cave qui nous ont reçus, à la passion qu’ils témoignent vis-à-vis de leurs vins et de leur aventure.
Il ne faut donc pas seulement passer au caveau. Il faut venir visiter la cave et se promener, l’été, en compagnie d’un vigneron de l’Étoile, sur leurs terroirs auxquels, tous, sont très attachés. Preuve en est : la cave de l’Étoile ne se contente pas de faire d’excellents vins doux naturels. Elle est engagée dans un combat, celui contre la désertification. Elle vient de racheter 7 hectares d’un seul tenant qui ne trouvaient pas preneur. La culture des vignes a été confiée à une structure de réinsertion par le travail.
Bien sûr, je retournerai visiter les vignes pentues du Douro. Mais plus souvent encore je viendrai arpenter celles de la Côte Vermeille et goûter ses vins doux.
La cave de l’Étoile est située à deux pas des 9 caves, une autre aventure coopérative, un autre style, mais une passion identique. Voir mon article de mai 2017.
Autre aventure de passionnés : la vinaigrerie artisanale de la Guinelle, tout proche de Banyuls, dans un cadre idyllique. Si vous êtes dans le coin, aucune excuse pour ne pas pousser jusqu’ici, vous ne le regretterez pas. Allez-y en ce moment, c’est parfait. Dégustation et visite en mode convivial et enthousiaste. Des vinaigres de Banyuls rouge bien sûr, mais aussi de Banyuls blanc, bien plus rare, mais encore de muscat Saint Jean de Minervois, ou de Cabernet ! Et j’en passe. Surprenant. Boutique également dans le cœur de Banyuls.